Pour changer le cours des évènements...

Paradis des Enfers, Village de Dagora. Le campement des terribles Mercenaires… Il y a bien longtemps qu’Ertaï n’avait mis les pieds dans cette région. En effet, elle était géographiquement encore plus éloignée de son lieu de résidence que la caverne de Dante lui-même. Mais ce matin-là était bien particulier entre tous, et la présence de l’Elfe Déchu dans cette antre dans laquelle il n’était pas vraiment le bienvenu avait un but de la plus grande importance…

Arborant comme à son habitude un ensemble sombre, large, encapuchonné, couvrant chaque carré de peau qui pourrait être visible, il s’avança à travers le camp. Il huma l’air vicié qui y régnait. L’alcool, la crasse, la poussière et le sang empestaient les environs, et l’atmosphère était vraiment nauséabonde ici. Pourtant, il ne grimaça même pas. Un souffle froid lui balayait le visage, en le faisant sourire d’un air mauvais. Au-dessus des têtes, de gigantesques nuages noirs s’étaient amassés, annonciateurs d’une tempête prochaine…

Les éléments sont avec moi… Pensa-t-il avec plaisir. Reste à trouver Merenid. Mais d’abord, je dois traverser ce trou à rats en tâchant de rester en vie…

Il avait été bien inspiré de se dissimuler sous ses amples vêtements de magicien. Si l’envie lui avait pris d’utiliser son pouvoir d’invisibilité, il aurait tôt fait de se faire repérer par les plus aguerris des soldats, ceux qui savent pister à l’odeur ou au bruit… Et si tel était le cas, sa race d’Elfe Déchu n’aurait pas pu être cachée aux yeux de tous. Et, il le savait, mieux valait pour un Elfe Déchu de ne pas ce montrer dans le coin. Tout en marchant, il réfléchit à se condition présente. Ses centenaires d’apprentissages lui avaient conféré de très nombreux pouvoirs, et il pourrait éventuellement venir à bout d’un mercenaire sans risquer trop d’ennuis. Mais s’il se devait d’en affronter un, et si par fortune il le jetait à bas, les autres ne lui laisserait pas le temps de se reprendre avant de fondre sur lui en masse. Et il y avait en ce camp cinq cent mercenaires, au bas mot. Mieux valait faire profil bas. Il rechercha des yeux les indications qui pourraient le mener jusqu’à la tente de Merenid. Il bifurqua sur la droite.

Le bruit qui régnait en ce lieu était indescriptible, et traduisait une agitation de milliers de personnes, mercenaires ou non. Les cliquetis d’armes des soldats, les harangues des marchands qui cherchent à appâter le client, le marteau du forgeron qui frappe le fer, les hurlements incohérents des saoulards de la taverne… Une désagréable impression saisit Ertaï à la gorge. Il n’aimait que peu le désordre et l’anarchie, le chaos et la débauche. Dans sa conception d’une armée, comme dans sa conception de la vie, il fallait être ordonné, rangé, chaque chose à sa place et parfaitement sous contrôle. Dante manquait de cette fermeté, et de cette vision des choses, et c’était pour cela que notre homme se trouvait dans ce taudis en ce jour. Car Dante perdait peu à peu le contrôle sur Merenid… Mais rien ne sert de ruer dans les brancards en se servant de la force brute dans ces cas-là. D’autant que ce "mouton noir" était de taille à en faire tomber plus d’un. Après tout, il avait derrière lui une armée… Ertaï était le remède. Sa science, plutôt, ainsi que ses méthodes. Il avait prévu, calculé, pensé pendant des heures au déroulement de cette journée, avant de se présenter physiquement jusqu’au chef des dissidents. Il aperçut au loin une tente plus grande et plus luxueuse et mieux gardée que les autres. Pas de doute, c’était là qu’il devait se rendre. Il s’avança, rigide, froid et placide, d’un pas lent et régulier…

Il ne connaissait pas encore bien le caractère emporté des Mercenaires. Il ignorait tout de leur goût pour les rixes, et la provocation des étrangers. Il n’avait jamais mis les pieds ici auparavant, et il n’avait jamais fait ses preuves devant leurs yeux: il était de ce fait une cible facile pour les provocations et les dérisions des soldats alentours. Malgré l’aura menaçante qui se dégageait de lui naturellement, ce à quoi il s’attendait ne manqua pas de se produire…

Au détour d’une ruelle, un homme à la carrure impressionnante déboula tout à coup sans crier gare, droit sur Ertaï qui marchait à présent d’un pas accéléré. Comme ce dernier était sur ses gardes, il l’évita de justesse en passant devant lui en coup de vent. Le bougre, étonné d’une réaction si imprévue, stoppa net, et l’invectiva avec brutalité dans la seconde qui suivit:

Hey, toi ! Viens ici, étranger... Je vais t'apprendre à regarder où tu mets tes sales pieds !

Ertaï s'immobilisa, sans se retourner, et poussa un soupir assez fort pour que l'écervelé qui l'avait provoqué l'entende. Sans même lui accorder un regard, il lui parla de sa voix sombre et menaçante:

A en juger par l'état de tes bottes, mes pieds doivent être moins sales que les tiens... Ne me parle plus sur ce ton et passe ton chemin. Je n'ai que faire des importuns.

L'inconnu devint écarlate en entendant ces mots. Tirant son épée, il marcha d'un pas rapide sur Ertaï en beuglant des menaces:

Tu vas voir ce qu'on réserve aux imprudents qui osent nous défier, ici! Prend ça!

Il abattit sa lame avec force dans le dos de l'étranger aux habits sombres, mais frappa dans le vide. Ayant perçu le bruit de la lame qui quitte son fourreau, Ertaï avait évité d'un bond agile le funeste sort qui lui était réservé. Il se tenait sur la droite du mercenaire, toujours dos à lui, toujours immobile. Le belligérant, estimant qu'il n'en avait pas fini avec lui, tourna alors son épée et trancha de nouveau en direction du magicien. Cette fois, c'est le bruit caractéristique de deux épées entrant en contact qui résonna dans la rue. Il avait tiré sa lame un bref instant. Nemesis avait vu la lumière du jour, le temps de parer le coup porté à son propriétaire. Sous les yeux ébahis du mercenaire, l'épée massive qu'il portait fut fendue en deux par la fine lame d'Ertaï. La partie haute de la grosse épée glissa en se désolidarisant, et chuta bruyamment sur le sol. Tournant Nemesis vers le visage livide de son adversaire, Ertaï reprit calmement:

Tu ne me feras rien voir du tout. Je ne veux plus te retrouver sur mon chemin à présent. Va-t-en.

Il avait compris qu'il ne fallait pas tourner le dos à cet ennemi-là. Rangeant doucement son épée dans son fourreau, il recula en se tenant à bonne distance, face au mercenaire désemparé.

Pourvu que la situation n'empire pas maintenant... Espéra-t-il en son for intérieur.

Il sût que ce souhait ne se réaliserait pas au moment où son dos entra en contact avec une surface dure, qui n'était autre que le torse proéminent d'un autre gorille de Merenid. Il se retourna brusquement en pensant:

Et merde... c'est mal barré.

Une paire de bras puissants le repoussa dans la direction opposée de la tente de Merenid, si fort qu'il manqua de trébucher. Immédiatement, le premier mercenaire qui l'avait provoqué le ceintura au niveau des épaules, l'empêchant de tirer de nouveau son épée. Il prit alors conscience, en entendant les rires tout autour de lui, que la foule avait formé un cercle et regardait, amusée, la bagarre qui se déroulait sous ses yeux. Les évènements comme celui-ci devaient être monnaie courante dans ce camp...

Le second gorille s'avança à son tour, le poing serré, un rictus au coin des lèvres. Il leva son bras immense, et l'abattit de toutes ses forces vers l'abdomen d'Ertaï. Mais le magicien, à défaut d'avoir la force physique, savait se montrer souple et agile, et il connaissait bien le corps humain. Il sauta de justesse en s'appuyant contre le torse de celui qui le retenait, et évita le coup qui lui aurait brisé les côtes. Il tenta de se dégager de la prise du mercenaire en lui expédiant un coup de pied dans le genou, à l'endroit le plus sensible. Celui-ci ne se fit pas prier pour lâcher prise, et Ertaï passa immédiatement en mode invisible, évitant de justesse un deuxième coup du gorille.

Assez joué, pensa-t-il, il est temps d'en finir.

Avant même que les deux hommes aient pu le localiser, Ertaï sortit de sa ceinture deux éprouvette fermées, une dans chaque main, et les déboucha en les fourrant sous le nez des deux hommes. Un produit très volatil s'en échappa aussitôt, inspiré contre leur volonté par ses adversaires. Ces derniers tentèrent une nouvelle fois de porter un coup à l'aveuglette, mais Ertaï, invisible, s'était déjà retiré. Il redevint visible de tous à quelques dizaines de centimètres, et dévisagea sous sa capuche ses deux opposants. Ceux-ci titubèrent un instant, l'oeil hagard et les épaules lourdes. Puis le moins costaud s'effondra tout à coup. Le gorille eût tout juste la force de se tourner vers Ertaï en murmurant difficilement:

Toi... Qu'est-ce que...

Puis il s'effondra à son tour. Le regard du vainqueur se posa alors sur le reste de la foule, qui fixait les deux hommes à terre. Un rire général parcouru l'assemblée lorsque le premier mercenaire au sol émit un ronflement sonore... Ils auraient pu mourir, si Ertaï l'avait voulu. Mais ce n'étaient que des pions... Seulement des pions. Voyant que chacun retournait à ses occupations, tournant encore les perdants en dérision, Ertaï repris sa marche vers la tente du chef après avoir subtilisé la bourse des deux inconscients pour leur apprendre les bonnes manières.

Il arriva devant la grande tente. Deux soldats armés jusqu'aux dents lui barraient l'entrée. Mais il avait autre chose à faire avant de demander audience. Il se hâta dans une ruelle sombre, et déboucha une nouvelle fiole dans laquelle se trouvait de la poudre. Il la répandit en une longue et mince traînée, laissant la plus grande partie à l'intérieur du flacon. La traînée faisait tout le long de la ruelle, mais était invisible au premier coup d'oeil. De plus, que savaient ces ignorants de ce qu'était la poudre? Il n'avait mis qu'une mince charge, qui lui serait bien utile plus tard. Il se plaça à l'autre extrémité, et alluma d'un discret sort de feu la poudre qui se trouvait là. Lentement, mais sûrement, les fines étincelles se propagèrent le long de la traînée.

Une demi-heure, ce sera bien suffisant.

Il s'assura que personne ne l'avait vu, en regardant tous les recoins et les toits, et en essayant de détecter d'éventuelles traces de magie... Personne. Définitivement personne. Il revint sur ses pas jusqu'à la tente. Là, il se posta devant les gardes, et demanda simplement de sa voix froide et sans hausser le ton:

Je souhaiterais m'entretenir avec Merenid en privé... Je suis un messager envoyé par Dante.

Il savait pertinemment qu'il prenait de grands risques en s'annonçant ainsi, mais il s'assurait non seulement de pouvoir parler à Merenid en personne, et seul à seul, mais également de ne pas être tué, en sa qualité d'émissaire. Merenid savait respecter le code d'honneur, d'après sa réputation... Il attendit patiemment la réponse du Seigneur des Mercenaires.

La voix douce de Sefir se fit entendre, une douceur sadique...

-De la part de Dante, hein?

Il s'avança très légèrement dans la lumière, de sorte que son visage restait caché.

-Et que nous vaut cet...honneur?

On sentait bien à l'ironie dans son ton qu'il n'en pensait pas un mot... Il avait bien envie de tuer l'impertinant, à défaut d'avoir Dante sous la main, mais décida que sa vengeance devait être préparée et executée comme il se doit.

-Entrez.....

Lorsque Ertaï aperçut dans la pénombre un jeune homme qui l’invitait à entrer, il sût au son de sa voix que ce dernier n’était pas Merenid. Il avait appris par les rumeurs et les observations que le chef des Mercenaires n’aimait certainement pas plaisanter, et traitait toujours ses affaires et ses hôtes avec beaucoup de sérieux. L’homme qui se trouvait devant lui s’adressait en des termes courtois, mais qui dissimulaient des intentions bien plus malhonnêtes… Il ne se pressa pas pour entrer dans la tente, mais prit au contraire le temps de détailler ce nouvel interlocuteur en restant sur ses gardes. Tout ce qu’il pouvait apercevoir de lui dans cette semi-obscurité était un tatouage tribal que l’inconnu portait à son bras gauche… Cela fût suffisant pour que le magicien tire ses propres déductions sur son identité.

Bien… Je vous remercie… Dit-il poliment en pénétrant dans la tente. A qui donc ais-je l’honneur de m’adresser ? Etes-vous un général de Merenid, ou un autre gradé à sa solde ? Vous devez en être bien proche pour vous trouver dans sa tente en son absence… Ne me dites rien, laissez moi deviner…

Il ne s’approcha pas de l’inconnu, préférant garder des distances respectables pour éviter les mauvaises surprises. A l’intérieur de la tente, le jeu de lumière était moins fort qu’à l’entrée, et les caractères et les traits physiques du mercenaire étaient plus visibles à présent. D’autant plus que les yeux d’Ertaï étaient habitués aux endroits sombres. Il put ainsi contempler une cascade de cheveux noirs qui tombaient sur les épaules du jeune homme, une carrure honorable et des muscles saillants, traits caractéristiques des mercenaires, ainsi que les armes et armures de ce dernier. Il portait une épée dentelée à la lame courbe et tranchante, luisant par endroits et entachée de sang d’autres parts, fixée à sa ceinture par un système rudimentaire mais extrêmement efficace pour dégainer rapidement son arme. Une autre lame, aussi courbe mais à simple tranchant, se tenait de l'autre côté. A moitié dissimulée contre l’arrière de sa hanche se trouvait une dague de forme classique, mais de dimensions telles que cette arme pouvait servir autant pour l’assassinat et le corps à corps que pour le lancer et le combat à distance. Il n’était pas bien difficile de deviner au premier coup d’œil que cet homme était un spécialiste de l’assassinat. Lui tourner le dos n’était pas une option. Ertaï se mit alors à observer son armure. Faite de lanières de cuir souple enroulées autour de l’abdomen de son propriétaire, ainsi que sur ses bras, elle semblait offrir une protection partielle, nettement moins efficace qu’une armure à plaques, mais qui procurait incontestablement une aisance de mouvements bien supérieure. Il pouvait facilement en déduire que les méthodes de combat de ce guerrier étaient basées sur la souplesse et la rapidité. Bien différentes des siennes. Il reprit calmement, sur le ton de la discussion :

J’ai entendu des rumeurs, à propos d’un étranger récemment intégré au camp des Mercenaires… On raconte, d’un côté comme de l’autre, qu’il a le plein appui de Merenid et qu’il représente une véritable menace pour les deux camps… Il tue, semblerait-il, comme n’importe qui pourrait aller faire ses courses, avec aisance et régularité, pour assouvir sa soif de sang…

Sous la capuche qui dissimulait ses traits, Ertaï regarda l’homme droit dans les yeux. Avec un sourire en coin, il reprit :

On raconte aussi qu’il se bat comme un lion, avec des armes semblables à celles du chef des Mercenaires, avec une agilité rare et une efficacité reconnue. Il ne porte pas les lourds harnachements classiques de ses soldats, et se bat sournoisement, attaquant dans l’ombre et tuant en silence… On peut le reconnaître, paraît-il, au tribal qu’il arbore fièrement sur le biceps de son bras gauche. N’est-ce pas… Sefir ?

Il sourit en prononçant ces derniers mots. Le doute subsistait, mais il y avait peu de chances qu’il se trompe en réalité. Il était au fait de bien des choses. Il était d’autant plus sur ses gardes que son adversaire s’avérait être un redoutable assassin… Face à lui, gardant ses distances, il le dévisagea d’un œil nouveau.

Puis-je savoir où se trouve Merenid ? Je n’ai pas été envoyé ici pour parler avec vous. Cet entretient doit se tenir en privé, et avec le chef des Mercenaires.

Le ton était ferme, mais non outrageant, bien que quelqu’un de fier eût pu le prendre pour une attaque personnelle. Ertaï arpenta la pièce lentement, sans quitter le tristement célèbre Sefir de ses deux yeux rouges comme le sang. Les mains sur sa ceinture, il s’attendait tôt ou tard à une réaction brutale et subite de ce dernier. Ainsi, il pouvait aussi bien dégainer son épée que tirer de sa cape une autre de ses énigmatiques fioles aux effets si divers…

-Félicitations, très cher... Je suis bien celui que vous croyez...

Il détailla à son tour le visiteur. Ses vêtements amples empêchaient de se faire une idée précise de son anatomie, mais Sefir parvint à s'en faire une idée générale... À force de vivre dans l'Ombre, il avait appris à discerner des détails...
Il ne faisait nul doute qu'il avait face à lui un Elfe Déchut, à en juger par le visage, dissimulé par de longs cheveux noirs... Assez large d'épaule pour un Elfe, néanmoins.
Sefir remarqua ensuite les gants noirs cousus de symboles cabalistiques. Nul doute quand à leur utilité: leur porteur devait être un magicien. Mais, aussi, Sefir remarqua une fiole à la ceinture du visiteur, visible un bref instant.

***Un maître de la magie et des potions...***

Il remarqua ensuite la ligne caracteristique d'une épée sous la cape de son vis-à-vis. Ce qui lui parut somme toute plutôt étrange pour un magicien...

***Restons prudent, il doit avoir quelques mauvaises surprises en reserve...***

L'une de ses dernières observations fut que son adversaire évitait de lui tourner le dos, et qu'il avait les mains prèt de sa ceinture. Pour dégainer plus vite, et éviter de recevoir un coup dans le dos...
La main de Sefir s'était innocemment rapprochée de sa dague.

-Si vous voulez traiter d'une affaire spéciale avec Merenid, vous pouvez tout aussi bien le faire avec moi...car vous semblez ignorer mon nom de famille...

Il s'était déplacé de façon à se retrouver dans l'ombre. Il murmura:

-Je m'apelle Sefir Ihlysthin, et si quelque chose concerne mon frère, cela me concerne aussi...

Sefir se sentit profondément insulté. Il avait attrapé le bouchon en plein vol, mais le laissa tomber. Avant que l'objet ne touche le sol, sa dague s'était déjà envolée...
Mais se ficha dans une poutre.

***Mais comment j'ai put rater ça?***

Il se sentait engourdis. Et dû s'appuyer sur quelque chose.

***Sûrement un de ses sales tours!***

-Crisis!

Un gigantesque cobra sortit de l'ombre...l'animal faisait un bon trois mètres de long. Il se posta devant son maître, qui renversa un panier duquel s'échappèrent plusieurs mambas noirs.
Habitués à l'odeur de Sefir, qu'ils considèraient comme un de leurs parents, ils se dirigèrent vers la presence étrangère de la salle.

Sefir voulut appeler les gardes, mais il n'en avait plus la force. La salle était grande, mais le poison finissait tout de même par faire effet.
Il s'assit contre une des colonnes.

Ce n'était pas prévu... Pensa Ertaï en voyant surgir d'un pant de la tente un énorme cobra de trois mètres de long. Je crois qu'il va falloir abréger cette entrevue...

Il ne pouvait se permettre de se mesurer aux serpents qui s'avançaient vers lui. Il avait le niveau pour s'en débarasser sans mal, mais il ne pouvait utiliser ses gigantesques pouvoirs ici... S'il devait rester discret, il ne fallait surtout pas qu'il en use maintenant. Il avait toujours Nemesis, qui dormait dans son magnifique fourreau, mais la gigantesque créature qui se trouvait face à lui ne serait pas vraiment une partie de plaisir à abattre... Surtout que le combat au corps à corps n'était pas le style favori d'Ertaï. Quoi qu'il décide, il fallait cependant qu'il agisse vite.En effet, les serpents se rapprochaient toujours un peu plus, sifflant et crachant contre lui. Il estima l'explosion qu'il avait programmé à environ deux minutes... Il avait donc deux minutes pour prendre une décision, ou tenir face aux serpents avant de fuir le camp des mercenaires.

Il semblerait que je ne puisse pas en arriver là où je le souhaitais... Dit-il, imperturbable.

Il plongea de nouveau sa main sous sa cape, et en tira une fiole de couleur rouge ocre. Il se plaça face aux serpents, et la jetta à leurs "pieds". La gerbe de flammes qui s'éleva tout à coup carbonisa instantanément l'un des mambas, et les autres se reculèrent en sifflant. Le cobra noir, qui semblait répondre au doux nom de Crisis, leva la tête au-dessus du rideau de feu, en se tenant à l'écart. Le regard du reptile croisa celui d'Ertaï. Les yeux jaunes et fins se plongèrent dans les pupilles rouges. La créature siffla de nouveau, mais n'osa pas s'approcher, ni risquer de traverser les flammes qui protégaient Ertaï. La voix d'un garde se fit alors entendre à l'entrée...

Seigneur Sefir...? Que se passe-t-il ? Avez-vous besoin d'aide ?

la voix était hésitante, et le garde n'osait pas passer la tête par l'ouverture de la tente...

Ils craignent de déranger leur maître, et d'en subir les conséquences... Il doit vraiment leur faire peur, pour que ceux-ci réagissent de la sorte...

Il prit un air amusé. A travers le rideau de flammes, il porta son regard sur Sefir, qui avait tout juste trouvé la force de s'asseoir contre une des colonnes de bois de la tente. Sa voix se fit de nouveau entendre:

Bien... Vous etes un homme plein de ressources... Alors transmettez ceci à Merenid. Dites lui qu'il aura bien plus à perdre que la vie, s'il poursuit sur ce chemin dangereux... S'il revient auprès de Dante, il obtiendra son pardon, et peut-être même son soutient. Si par malheur il s'obstine... Alors nous serions susceptibles de nous revoir, tous les deux. Je vous laisse décider. Adieu, guerrier de l'ombre!

Au moment où il prononçait ces mots, le garde à l'extérieur lança timidement:

Maître Sefir...?

Puis ce fût l'explosion. La rue d'à côté fût ébranlée par une détonnation gigantesque, que tout le camp pût ressentir. Les faces des bâtisses tombèrent en morceau, la fumée et la poussièrent emplirent un instant tout le secteur. Ertaï l'avait prévu depuis le début, c'était son plan de secours, et celui-ci sembla fonctionner à merveille. Les deux gardes se précipitèrent vers le proche lieu de l'explosion, délaissant un bref instant leur poste, et Ertaï sortit. Au-dehors, l'atmosphère était blanche de poussière et de gravats, des cris retentissaient de tous côtés, et les gardes se pressaient vers les décombres, repoussant les curieux qui venaient admirer le carnage pour extirper les bléssés.

De son côté, Ertaï avait le champ libre, à présent. Mais il devait faire vite. Le poison paralysant avait des effets de courte durée, et Sefir n'en avait pas inhalé une grande quantité dans cette vaste pièce... Il serait bientôt sur pieds, plus furieux que jamais. De plus, les gardes commençaient à revenir dans sa direction, et il ne devait pas rester dans cet endroit malsain... Il pressa le pas en direction de la sortie du camp.

Dans la tente, les flammes continuaient de se propager, embrasant la toile, et puis les poutres de bois. A l'intérieur, Ertaï avait abandonné Sefir à son triste sort... Parviendrait-il à s'en sortir vivant ? Le magicien aurait souhaité que non.

Finalement, Sefir retrouva l'usage de se smuscles. Sortant de la tente en courant, suivit de Crisis, qui alla se réfugier dans un coin sombre, il hurla:

-Dépêchez-vous, bande de larves! Dix hommes à la recherche de notre ami l'elfe, le reste magnez-vous, éteignez ce feu!

Un jeune soldat hésita à s'approcher du brasier et fu executé.

-Bougez-vous!

Les soldats obéirent, faisant la chaîne pour éteindre l'incendie. Des yeux, Sefir cherchait le lâche...

***Tu me paiera cela au centuple...non, tu le NOUS paiera en deux cent fois pire...***

Les dix soldats avaient répendus la nouvelle, tandis que les trois quart du camp s'occupait de maîtrsiser les flammes, l'autre quart cherchait le responsable...
Par groupes de 1à ou 15, ils patrouillaient dans les rues...
Nul n'avait envie de revenir bredouille.

C'est lui, il est là !!!! Arrêtez-le, pour notre Seigneur !

Le chef du groupe de gardes en patrouille avait intimé l'ordre à ses soldats. Ils avaient fini par retrouver Ertaï, qui tentait tant bien que mal de se fondre dans la foule. Les hommes en armure commencèrent à s'approcher au pas de course, tirant leurs épées au milieu des cris de surprise des passants.

Et merde... Pensa Ertaï. C'en est fini de la discrétion... Tant pis.

Dans un geste ample et théatral, il se retourna vers les gardes, ses yeux rouges luisants comme deux rubis ensanglantés, dans la rue qui se vidait rapidement de tous les passants. Sefir n'aurait pas dû donner cet ordre fou, de tenter de capturer un si puissant magicien... Dans un virevoltement de cape, Ertaï disparut sous les yeux de ses assaillants, devenu invisible de par le pouvoir issu de sa race.

Adieu, pauvres fous...

Les trois premiers soldats n'eurent que le temps d'entendre le bruit de métal que fit Nemesis en sortant de son fourreau. D'un geste vif, Ertaï lança son attaque. Trois gerbes de sang sortirent de la jugulaire de ses victimes, et vinrent arroser le sol comme une pluie de mort. Dans son poing fermé sur le manche, le magicien sentit le liquide chaud couler, et Nemesis qui en réclamait encore et encore...

Groupez vous en formation, vite ! Cria le chef.

Deux malheureux ne furent pas assez rapides pour rejoindre le groupe. Une entaille se forma à travers leurs armures, seul témoin du passage de Nemesis à travers le fer. De son côté, Ertaï pouvait voir au bout de son bras son épée qui transperçait les côtes de mailles et plaques de métal comme du beurre, jettant à bas leurs propriétaires... Lorsqu'il eût achevé le second mercenaire, il regarda le petit groupe de dix qui s'était formé, tous en cercle, tentant de le localiser.

Ce bâtard s'est rendu invisible... Faites silence et essayez de le repérer, mais ne vous éloignez surtout pas ! Ordonna le gradé.

Trop facile... Vous me simplifiez la tâche, messieurs Pena Ertaï avec un sourire.

Il claqua simplement des mains. Il maîtrisait parfaitement la magie, à un point jamais égalé, et le groupe de soldats entassés lui facilitait beaucoup les choses. Le pillier de feu s'éleva au milieu de ces derniers sans qu'ils aient pu se rendre compte de ce qui leur arrivait. Les cris, l'odeur de chair brûlée, les rescapés provisoires tentant de fuir, le visage se consumant sous leur armure, et Ertaï observant son oeuvre d'un air satisfait...

Il tourna brusquement les talons, demeurant invisible aux yeux des Hommes, et commença à courir en direction de la sortie. Il avait perdu du temps avec ce combat, et il avait révélé sa position à ce moment-là. Déjà, au loin, il entendait les cris de nouvelles factions qui hurlaient: Il est là, il s'enfuit, attrapez-le !

Pourvu que j'arrive à temps...

Il apercevait au loin la porte du campement qui se refermait lentement, gardée par deux colosses en armure qui portaient respectivement une lance gigantesque et une épée. Lorsqu'il arriva à la porte, l'un d'eux, celui qui portait l'épée, se mit en travers de son chemin. Il avait dû repérer son flux de magie qui se déplaçait... Certains avaient appri à développer ce pouvoir... Mais cela ne saurait empécher Ertaï de passer. L'homme pouvait le deviner, mais pas le voir, et c'était amplement suffisant.

Halte là, ne m'oblige pas à... AAAAAAAAAAAAAAAAH !

Le garde avait poussé un hurlement digne des plus grands films d'horreur. Nemesis avait tranché son épée en deux, puis la lame légendaire s'était abbatue sur son bras, le séparant du reste du corps dans un éclat pourpre... Le soldat tomba à genoux, et Ertaï l'acheva en lui tranchant la tête, qui roula sur le sol. Il leva les yeux vers la porte, qui venait de se refermer dans un bruit sourd. Etait-il pris au piège? Non... Il en fallait plus pour arrêter un si puissant magicien. Il aurait pu sans trop de mal faire une brêche dans la porte ou dans la palissade, mais il savait Sefir à ses trousses, et il ne voulait pas lui faciliter la tâche en cas de poursuite. il reporta son regard sur le second soldat, qui portait une longue et solide lance.

Parfait... se dit-il, Tu vas me servir à quelque chose...

Enchaînant les signes de ses mains, il les porta tout à coup à sa bouche, et une boule de feu sortit de ses doigts. Le garde, le souffle court, n'eût que le temps de se baisser pour éviter de la prendre en plein figure, et cette dernière s'en alla percuter le haut de la porte de bois, en carbonisant une partie. A l'endroit où la boule de feu avait fait son oeuvre, la hauteur était à présent diminuée, mais restait innaccessible.

Voilà qui est suffisant ! En garde ! Lança Ertaï en redevenant visible.

Le soldat, toujours devant la porte frappa un coup de lance en direction d'Ertaï qui courrait sur lui. Ce dernier l'évita d'un saut et la lame de la lance se ficha dans le sol, toujours maintenue à son autre extrémité par le garde médusé. La suite fût très rapide. Ertaï atterit sur le manche de métal de la lance, et continua sa course en équilibre sur celui-ci. Son adversaire n'eut pas le temps de comprendre, lorsque sa tête quitta son cou pour tomber lourdement sur le sol. Ertaï, Nemesis en main, prit appui sur les épaules du garde avant que celles-ci ne s'affaissent avec le reste de son corps, et fit un bond en exécutant une pirouette pour passer par-dessus le trou qu'il avait fait dans la haute porte de bois. Il franchit de justesse l'obstacle, et retomba de l'autre côté, solidement campé sur ses deux jambes. Il avait quitté le camp des mercenaires. Il reprit son invisibilité en voyant des arbalétriers armer leurs carreaux, et poursuivit sa course. Sefir allait-il prendre le risque de le suivre en solitaire ? Se tournant vers la forteresse de bois, il lança:

Ce n'est que partie remise... Merenid, vous serez un jour à genoux devant Dante... Et devant moi... Quand à vous, Sefir...

Il n'acheva pas sa phrase. Dans un rire amusé, il continua son chemin, surveillant par tous les moyens possibles que personne ne le suivait. Ce n'était pas totalement un échec, après tout. Aujoud'hui serait un jour noir pour les Mercenaires. Une vingtaine d'entre eux avaient péri, sans compter les dégats de l'explosion et du brasier qu'il avait déclenché... Tout compte fait, il devrait essayer plus souvent ce genre de choses, pensa-t-il avec ironie, alors qu'il s'éloignait à toute vitesse...

-Seigneur Sefir?
-Quoi?
-Il...il nous as échappé.

Le soldat était loin d'être à son aventage...

-Donc, un de ces salopards d'Elfes a réussis à vous mettre en échec?
-Il a utilisé ses tours d'Elfe! Il s'est rendu invisible et a utilisé la magie!
-Je vois...réparez les dégats!

Heureux de s'en tirer à si bon compte, le solat partit. Sefir, lui, fulminait. Il se vengerait, et ce, dès ce soir.

-Réparez les dégâts! Renforcez la porte! Et doublez la garde! Dans Dagora, pas un seul lézard ne doit sortir de son trou, pas un seul insecte respirer sans que nous le sachions, compris!

Un "Oui!" général retentit. Les patrouilles s'organisèrent. Sefir riait intérieurement, amusé de l'effet que la peur produisait sur les autres. Il regarda les cadavres. Une vingtaine de morts...pas grand-chose, en fait...
Il tourna son regard vers Azurka. Dante payerai bientôt...et il comptait bien réserver un supplice spécial à ce magicien...
Ses hommes n'étaient pas les meilleurs combattants, mais leur nombre les rendait dangereux. Encore que contre un maître des talents magiques, cela ne fut pas très utile...

Cette nuit, il serait personellement dans Azurka...